Le travail de la terre. Terre d'accueil, "Teranga" en sénégalais. Ici c'est la terre sableuse du nord du pays. De la région fouta pas loin des dunes. De l'autre côté du fleuve Sénégal, c'est la vaste Mauritanie.

Le jardin est juste derrière les cases. Il n'y a qu'à passer l'étroite porte en fer rouge et il est là. Quatre grandes parcelles séparées par des leucaenas, flamboyants et fertilisants. Entourées par une maigre paille déjà bien entamée par les animaux.

A quelques pas de l'autre côté du mur, se trouve le forage au milieu des ânes, des vaches et des brebis. L'eau essentiel! On pourrait penser que tout a commencé par là, la certitude de trouver cet élément indispensable. Cela a en fait pris naissance à partir d'une parole. Une pensée verbalisée par un adolescent de 15 ans lors de vacances au village, il y a maintenant plus de 15 ans. Issa dit à son père: "un jour je verrais bien des cases au croisement (lieu dit), il faut acceuillir des voyageurs dans un environnement traditionnel, ça peut marcher!" Il enonça même le forage... Et une station essence qui, elle, sera construite plud tard par un autre "entrepreneur". Le papa d'Issa a donc dessiné un plan, construit, maçonné. Il investi ses économies faites durant les 40 années passées à Paris. Un resto, hôtel et boîte de nuit; le Sénégal cotoyais la Bastille! Malgré les dires de son entourage et des gens du village: "Tu es fou!", "Et il n'y a même pas d'eau!". Ce à quoi il repondi: "Il faut bien que je laisse quelque chose à mes enfants". Sachant pourtant que tous ses enfants ont grandi à Paris...Parfois c'est en écoutant son intuition que l'on prend les meilleures décisions.

Résultat: 40 hectares de terrain entourés d'un mur batti par lui seul, une auberge accueillant passants locaux ou étrangers, stagiaires de danse africaine, de capoera, de yoga. Et surtout un des fils, Issa en l'occurrence, et sa famille à l'initiative de tout ça.

Johana et Issa ont quitté Paris pour s'installer "au calme", près des grands parents comme cela leur tenait à coeur. Ils accompagnent leurs 4 enfants vers leurs envies en leur proposant les supports nécessaires, suivent leur rythme, en toute confiance, sans école (choix courant ici). Parfois c'est aussi les enfants qui suivent leur parents jusqu'au jardin ou aux animaux chaussés de leurs bottes... ou de leurs tongs! Suivant leurs aspirations...

Issa aussi a eu une bonne intuition ce jour de vacances de manifester son imagination...


C'est avec Johana que je franchi pour la première fois la porte en fer rouge. On y trouve des bananiers, cocotiers, des parcelles de navets, pastèques, courgettes, carottes, combo, aubergine, blettes, maïs, etc. Des plants d'ibiscus. Des pépinières de piments, salades et tomates. Des essais de café, de riz, de manioc. On verra bien ce que ça donne! comme dit Johana avec son grand sourire. Je fait la rencontre de Djibi, Aliou, Amadou et Mbaye les jardiniers, mes futurs collègues!

Tous les matins, je mis les pieds dans la terre: bêchage, paillage, arrosage, réalisation de "gomboules" à la houe, plantations, retournement du compost. Ce travail m'apporta rythme, dépense physique, calme et connaissance. Je réalise que c'est en touchant la réalité du doigt que j'apprends le plus. Je dois faire partie de la famille des "kinesthesiques", ceux qui retiennent en participant, touchant, imitant, qui s'exprime dans le mouvement..

Les jours passés ici m'ont donnés confirmation de la patience que demande un jardin. A petite échelle ici mais Johana m'assure que ça l'est davantage sur les années! Dautant plus quand on fait le choix de cultiver à la main, sans engrais ni pesticides. Plus qu'un concept, c'est un état d'esprit. Penser, réaliser et obserser ses plantations jusqu'à la dégustation: bienvenue à ma nouvelle passion!



Pour conclure je dirais que le jardinage laisse place à évasion et rêveries. Cela permet d'aller chercher au fond de soi les plus belles graines que l'on choisi de planter, faire germer. C'est en fait la "cultivation" de son intuition.